LE
VENTRE DE LA FORÊT
Au
loin au bout de cette route pointait l'orée de la forêt
Il
allait enfin pouvoir y pénétrer et seul s'y abandonner
Le
chemin y grimpait et il allait tout doucement le gravir
Pour
profiter de cet instant béni qui attisait son sourire
Ses
pas harassés se faisaient de plus en plus légers
Il
accédait sans le savoir à cet havre serein de paix
Les
feuilles amoncelées dans leurs tapis automnal
Lui
déroulaient la route éternelle vers son Graal
Son
cœur et ses tempes tapaient et s'accéléraient
Que
ce bruit sourd devenait doux et inaccoutumé
Le
vent dans les arbres soufflait sa folle mélodie
Tant
de notes tintaient inconnues et étourdies
Il
s'arrêta pour humer les parfums de la nature
Une
rivière naquit dans ses yeux embués
Il
ramassa une feuille pour lire dans ses nervures
Son
avenir appartenait à ces sous-bois enchantés
Ses
larmes coulaient et la feuille fragile frissonnait
Il
la garda dans sa poche serrée tout contre son cœur
Il
venait d'entrer doucement dans le ventre de la forêt
Sans
un bruit il effaçaient ses anciennes rancœurs
A
chaque arbre rencontré une histoire ici et là germait
Ils
étaient sa famille si heureux de les retrouver
Il
effleurait parfois leurs troncs cicatrisés et il pensait
Que
cet échange intemporel était sublime et intense
Sur
le tapis de mousse traversé il rencontra la douceur
Ses
pieds s'y enfonçaient et il touchait enfin au mot bonheur
Devant
lui resplendissait l'élégante reine rouge du peuple boisé
Une
gracieuse amanite étirait sa silhouette et tirait son chapeau
Rouge
étoilée de blanc il la trouva merveilleuse et sublime
Mais
sa beauté éclatante il n'en deviendrait pas victime
Il
connaissait bien trop la vie pour se laisser ainsi méprendre
Il
avait appris dans la forêt il avait vécu sans toujours comprendre
C'est
autre chose qui l'attirait maintenant inopinément
Il
sentit un appel lointain comme une douce présence
Il
avança vers les fougères imposantes maladroitement
La
lisière du bois était toute proche son âme la pensa
Là
au milieu du dernier et ultime tapis de mousse
L'attendait
secrètement une toute petite tête marron
Un
peu gauche un peu timide mais recherchée par tous
Il
crut bien que celui-là lui était destiné : son champignon
Il
ne le cueillit pas de suite il préféra l'observer un moment
La
rivière de ses yeux refit surface larmes de bonheur
Il
le sépara alors de sa terre nourricière tout doucement
Et
le déposa dans sa besace pleine d'espoir et d'apesanteur
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