LA MECANIQUE DES MOTS ©
Ecrit par Christel Lacroix auteur
Cachée dans le grenier à l'abri du monde bruyant
Je venais la retrouver là chaque jour en souriant
J'enfonçais mon doigt sur la lettre A et je rêvais
La magie naissait alors et je me laissais emporter
Le bruit sec du levier frappait le papier fragile
L'encre noire faisait naître une lettre indélébile
Je devenais fée au pays des mots qui naissaient
J'étais écrivain au pays des phrases terminées
Son ruban rouge et noir dansait à fleur de peau
Laissant échoir une lettre sur la plage des mots
Mes doigts s'envolaient à son rythme effréné
Une histoire déroulait son tapis à mes idées
Assise en face d'elle je lui racontais mes secrets
C'était ma pure confidente mon amie du grenier
A chaque point je poussais le levier du chariot
Pour revenir à la ligne et ne pas en écrire trop
J'aimais cet instant où l'on osait passer à la suite
Dans un geste mécanique répété à la va-vite
Comme quand on a le cœur beaucoup trop gros
Et que l'on s'efforce de mettre le cap vers le beau
Mes pensées déambulaient collées au papier blanc
Parfois le carbone les recopiait inlassablement
Je rattrapais son fragile vélin me salissant les doigts
Comme si j'eus touché les ailes d'un papillon de soie
Le bruit rythmé des leviers entonnait une mélodie
Je devenais musicienne au pays magique des écrits
Le monde dehors disparaissait doucement en silence
Nous étions seules à regarder les caractères en transe
Le clavier donnait un relief noir à mes doux délires
Je pouvais presque caresser mes mots et les sentir
Je déroulais alors le papier en tournant le rouleau
Et je libérais doucement mes histoires de leur étau
Emportant ma feuille remplie de mots tel un trophée
Je saluais ma machine à écrire d'un sourire apaisé
Et je partais en apesanteur vers ce monde indécis
Où j'allais pouvoir inventer d'autres histoires inouïes
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